Rapidus est un nom qui circule depuis quelques temps dans les cercles de l’industrie des semi-conducteurs. Cette jeune société japonaise fait un petit peu l’actualité en affichant la volonté de faire trembler le géant taïwanais TSMC.
Son ambition : proposer de la gravure de puces en 2 nm dès 2025… Attention, on parle seulement d’une phase de prototypage. La production de masse serait lancée en 2027.
Une annonce audacieuse, presque insolente, face à une industrie où TSMC règne en maître et où les milliards investis par Intel continuent de provoquer des secousses.
Alors faut-il prendre Rapidus au sérieux ?
Mais qui est ce Rapidus ?
Rapidus n’est pas totalement sortie de nulle part. L’entreprise a été créée en août 2022 et est considérée comme le champion national des semi-conducteurs du Japon. Elle est organisée conjointement par le gouvernement japonais, Sony, Toyota, KIOXIA, NTT, SoftBank, NEC et Electronics.
IBM serait de la partie, apportant son expertise de longue date notamment dans la future mise au point des puces en 2nm. Mais surtout, Rapidus vient de mettre la main sur une machine EUV (Lithographie Extrême Ultra-Violet) de chez ASML. Il y a à peine quelques jours, l’entreprise a confirmé que sa première machine EUV était arrivée à l’usine de fabrication de plaquettes IIM-1 à Chitose City pour y être installée.
Ces machines sont aussi énormes que coûteuses mais elles sont surtout capables de graver des circuits ultra fins permettant d’installer rapidement Rapidus dans la course. Cette acquisition fait de Rapidus le premier acteur japonais à s’en procurer une. Un joli trophée, qui prouve la volonté du Japon de revenir dans la course à la miniaturisation mais aussi une volonté d’investissement importante.
L’importance des 2 nm
TSMC, leader incontesté des puces, prévoit de passer à cette étape vers 2025. Mais compte tenu de son avance sur ses concurrents, on comprend bien que l’entreprise est plus dans une logique de gestion que de course en solitaire. Intel avec son 18A et d’autres pensent qu’ils vont pouvoir rivaliser. Rapidus, veut s’imposer dans cette course frénétique et on a bien compris que derrière l’entreprise, les moyens d’un état sont aussi là pour busculer ce marché. Mais l’argent, les machines et la volonté ne font pas tout.
Le retour du Japon sur la scène des semi-conducteurs
Il y a quelques décennies, le Japon était un acteur majeur dans le domaine des semi-conducteurs. Puis le pays a perdu du terrain, laissant les Américains, les Coréens et surtout les Taïwanais dominer le marché. Rapidus incarne ce désir de reprendre la main. Le gouvernement japonais soutient cette initiative, car il s’agit aussi de souveraineté technologique, et de ne plus dépendre d’autres nations pour l’approvisionnement en puces avancées. Gardons à l’esprit que les tensions entre la Chine et Taïwan font planer une ombre sur la stabilité de ce marché dans les prochains mois. Dans ce contexte, voir le Japon redevenir une place forte des semi-conducteurs pourrait rassurer certains acteurs occidentaux.
Nvidia, un partenaire potentiel ?
Selon certaines rumeurs, Nvidia pourrait être intéressée par les services de Rapidus. Alors que tout est rose dans la vie commerciale de Nvidia, des voix pointent de plus en plus sa dépendance envers TSMC…Le même raisonnement tient aussi pour Apple. Si Rapidus parvient vraiment à proposer du 2 nm au même niveau que TSMC, Nvidia aurait alors un levier pour négocier les coûts, la flexibilité, et les délais. Le tout en levant un risque en cas de tensions géopolitiques.
Mais encore faut-il que Rapidus tienne ses promesses. Et sans préjuger des qualités qui animent les équipes de l’entreprise nippone, le long chemin de croix que s’inflige Intel pour revenir au sommet, est à méditer.
Dans cette histoire, tout n’est pas qu’une question de machines, c’est aussi une question de talents et de savoir-faire. Les ingénieurs spécialisés dans ces technologies sont rares et très demandés. Rapidus devra apprendre vite, recruter les meilleurs, innover, et éviter de se faire piéger par des retards ou des problèmes de rendements. Son calendrier semble dont très ambitieux.
Rapidus vs TSMC : quelles chances réelles ?
La question, la vraie, c’est : Rapidus peut-elle vraiment rivaliser avec TSMC en 2027 ?
Pour le moment, ce « bruit » autour de Rapidus éveille la curiosité des experts mais il faut se rendre à l’évidence : l’entreprise n’a pas encore commencé la production de masse d’une seule génération de puce. Le géant TSMC ne s’est pas fait en un jour et il parait difficilement concevable qu’un nouvel entrant se hisse directement au sommet.
Cependant, il conviendra d’observer si le soutien politique et économique du Japon, la présence d’IBM, l’accès à l’EUV d’ASML, se maintiennent dans la durée. On a pu aussi constater que des pays sous embargo et sans accès théoriques aux dernières machineries, redoublaient d’ingéniosité pour disposer eux aussi de technologies compétitives.